le prix du pain
« Dans les prochains mois, les prix de la baguette de pain, des pâtes, de la farine, de l'huile, de tous les produits de première nécessité, de la viande, vont bien entendu augmenter », a déclaré, jeudi 27 janvier, Bruno Le Maire. Pour le ministre de l'Agriculture, la hausse est « inéluctable. »
La prédiction ne manquera pas d’affliger les consommateurs. Mais pour l’auteur « Des hommes d’Etat », la spéculation, née des tensions sur les marchés de matières premières, tensions amplifiées par les inondations en Australie, s’annonce comme une bénédiction. Empêtré dans la question du revenu agricole, le ministre va pouvoir regarder la hausse des prix y répondre tout simplement.
Pourtant, ce n’est pas comme si le prix des denrées alimentaires n’avaient pas augmenté. Le prix du pain, ô combien symbolique, en est l’exemple le plus flagrant.
Officiellement la hausse du prix du pain est modérée. Selon, l’Insee, notre bonne vieille baguette contribue même à modérer la hausse de l’inflation. Voilà qui est très contre intuitif, pour le consommateur qui voit chaque année l’étiquette de sa baguette s’alourdir de quelques centimes.
Marianne s’est donc plongée dans les chiffres.
Que nous dit tout d’abord, notre institut national de la statistique et des études économiques. Dans le détail de l’IPC, indice des prix à la consommation, on peut suivre par type de produit l’évolution des prix. Si l’on fixe à 100 en 1990 la part de pain dans le panier de la ménagère type, la dame imaginaire dont l’évolution du cabas défini l’inflation, celle-ci ne pesait plus que 91,7 en 2010 (courbe rouge).
L’étude de l’Insee est implacable : le pain est bon marché…Il est même 18,3% relativement moins cher.
Sauf que comme l’indique notre graphique, l’Insee mesure l’indice pondéré. Quesako ? Pour le statisticien trois choses doivent entrer en ligne de compte pour apprécier au cours du temps l’évolution du prix d’un produit au sein du panier de la ménagère. Son prix évidemment, mais aussi la quantité consommée, et enfin la qualité.
Écartons la qualité, que nous assumerons comme stable. Reste donc le prix (courbe verte) et la quantité, que traduit la pondération dans le panier (courbe bleue).
Et là ce n’est pas du tout la même chose.
La courbe verte indique clairement que le prix du pain a enregistré une hausse de 59%. A suivre les chiffres de l’Insee, pour la même baguette qui coûtait 48 centimes d’euros (3,15 francs) en 1990, il faudrait débourser 76 centimes aujourd’hui. Premier hic : selon les chiffres de la profession, en 2010, le prix de la baguette s’approche davantage des 85 cts que 76 cts. Ce qui porterait la hausse non pas à 59 % mais à….77 %. Sans doute doit-on voir dans cet écart le fameux effet qualité, les Français achetant davantage leur pain dans les grandes surfaces…
Second hic : l’effondrement de la pondération sur 20 ans. A suivre toujours l’Insee, quand les Français consacraient 1,04% de leur budget au pain en 1990, il n’en consacre plus guère que 0,6%. Soit une chute de 42 %. Sauf que là encore, les chiffres fournis par le Centre de recherche pour l’étude l’observation des conditions de vie (Credoc) sur la consommation de pain sont en contradiction avec ce qu’observe l’Insee. En 1990, les Français consommaient 160 grammes de pain en 1990 et autant en 2006….
Difficile de concilier cette stabilité avec la chute de pondération de l’Insee.
Résumons :
i./ Le prix de la baguette a explosé de 59 % au moins;
ii./ les français en consomment autant (au moins jusqu’en 2006), mais sa pondération baisse;
iii./ l’effort consacré selon l’Insee à l’achat de pain a baissé de 18,3 %.